250 km de ligne droite avant la frontière des USA. Dans trois heures maxi, nous y sommes. C'était sans compter le padre qui, de plus en plus tendu, en oublie d'appuyer sur la pédale de l'accélérateur. S'il pouvait, il mettrait la marche arrière.

A croire qu'il s'apprête à passer la frontière clandestinement.

C'est que cette frontière est un véritable mythe. On en entend parler depuis le Guatemala. Beaucoup de récits de chauffeurs de taxi ou de mécaniciens traversent nos pensées à cet instant-même.

Ils racontent les billets durement gagnés qui atterrissent dans les mains du coyote, passeur qui forge sa richesse sur le rêve américain. Ils racontent la traversée du désert de nuit, le froid qui y règne quand le soleil se couche, la difficulté de ramper sur des centaines et des centaines de mètres, l'atmosphère hostile de la nature aride. Et puis, ils racontent les dollars qui tombent,la liberté des zéros qui se suivent, la solitude aussi, la famille restée au pays et .... le retour.

Pour nous donc; pas question de désert, de ramper par terre mais bien passer de l'autre côté en toute légalité.

Le drapeau américain s'élève déjà au loin, un « Hello » nous accueille.

..Et le passage de la douane mexicaine alors? Et bien, nous sommes passés à côté. Quelle affreuse mistake!... On se voit déjà refaire le chemin à l'envers. Mais l'Américain nous lance un grand « I don't care about Mexican »,à croire qu'il nous sauve la vie.

Quelques sourires, une fouille rapide et les portes des USA nous sont ouvertes sous nos yeux ébahis, étonnés que tout se passe aussi vite. Et notre stamp alors? Rien... Non mais on va pas partir sur les routes d'Arizona sans notre stamp? On insiste pour enfin obtenir notre autographe. Voilà c'est fait. Incredible, on entre ici comme dans un moulin et les tâches administratives sont un peu bâclées.

Notre premier bivouac? Le Walmart! Une maison de retraite ressemblant à un magasin, la moyenne d'âge des employés avoisinant les 70 ans. Les mamies sont derrière la caisse pendant que les papis remplissent les rayons.

Bienveillance et sourires seront nos premiers contacts américains.

« Papa, on dort au magasin, aujourd'hui »